Emprises sur la biosphère
L'exploitation d'une source d'énergie nécessite de l'espace qui devient moins disponible, à divers degrés, à d'autres utilisations, à la faune et à la flore.
On peut penser :
Aux surfaces de terrains occupées
Aux fluides environnementaux, l'air, l'eau qui sont pollués, altérés
Ces éléments sont donc rendus moins accessibles en qualité et quantité pour la faune ou la flore y compris nous les humains.
Il convient donc d'évaluer ces impacts et de les pondérer en importance.
Cette analyse est faite qualitativement ce qui permettra quand même d'apprécier les différences les plus criantes entre les différentes sources d'énergie.
Fondamental : L'occupation des surfaces
Sur cet aspect, l'hydroélectricité est très gourmande. En effet, en plus des installations construites comme les centrales, barrages, digues, et autres emprises, s'ajoutent pour les centrales à réservoir, des kilomètres carrés de terres inondées. En plus, une partie encore plus importante du territoire est asservie de façon hydrologique, sans aucune altération, pour recueillir l'eau et alimenter par les voies naturelles préexistantes ces réservoirs. Donc, l'aménagement du territoire par l'hydroélectricité peut en fait couvrir un pays entier.
Il devient donc évident que l'appréciation du tort soit faite pour établir des comparaisons.
Il y deux notions à tenir en compte :
la qualité écologique de l'espace occupé.
le degré de partage de cet espace avec la faune, la flore ou tout autre utilisation sociale.
Dans un premier temps, il faut apprécier l'importance écologique de l'espace occupé. Par exemple, la centrale Robert-Bourassa est creusée sous la montagne et donc le volume occupé a peu de qualité pour la faune, la flore ou tout autre utilisation, si ce n'est de l'évacuation des déblais qui doivent être relocalisés dans le voisinage. Par contre, le barrage lui-même, le déversoir, les carrières qui ont été exploitées pour les construire ont modifié de façon importante des surfaces de terrain de très bonne qualité et laissent peu de partage avec la faune et la flore. On peut imaginer que les terrains occupés par les centrales thermiques sont aussi d'utilisation assez exclusive.
Dans l'illustration suivante, on saisi l'envergure des emprises de l'évacuateur de crue et du barrage principal à LG2. Ce barrage retient une chute de presque 140 m.
Pour l'hydroélectricité, l'empiétement sur le territoire ne s'arrête évidemment pas là. Les réservoirs créés ont inondé des kilomètres carrés de terres de très bonne qualité écologique. Ces surfaces soutirés aux espèces terrestres deviennent disponibles aux espèces aquatiques ce qui perturbe de façon significative mais temporaire la faune et la flore. Mais le fait de passer d'une rivière à un lac modifie considérablement l'habitat.
Sur la vue satellitaire suivante qui reste partielle, on voit comment un aménagement hydroélectrique peut modifier un vaste territoire. On y voit cerclé les réservoirs créés pour entreposer l'énergie hydraulique. Il faut observer qu'en dehors des zones inondées ou affectées par la montée des eaux, le réseau hydrologique, en soi, n'est pas affecté.
La production d'énergie occupe des zones qui en rapport aux autres activités écologiques peuvent être :
En complète exclusion
En partage
Sans aucune nuisance
Il existe plusieurs solutions de mitigation qui sont mises en place.
De façon non exhaustive, on peut citer en exemple des :
plantations pour restaurer les surfaces mises à nu.
aménagements de frayères pour faciliter la transition entre les milieux aquatiques passés et nouveaux.
optimisations des espaces occupés
Fondamental : L'altération des fluides air et eau
La production d'énergie peut affecter de façon considérable l'atmosphère en particulier en produisant des GES[6]. Ce sujet est traité dans la section Émission des gaz à effet de serre.
Pour ce qui est de l'eau, pour la production hydroélectrique, les quantités affectées sont considérables puisqu'elles comprennent toutes celles du réseau hydrographique qui est harnaché.
Cette eau est affectée de différentes façons :
par la pollution chimique
par le déséquilibre dans son interaction avec l'air de l'atmosphère
par la perturbation de son écoulement
La pollution chimique de l'eau la plus significative est celle due au mercure.
Le mercure est émis dans l'air de façon naturelle par les volcans et les feux de forêt ou engendré par des activités humaines, comme la combustion du charbon et le brûlage des déchets. Il est transporté dans l'atmosphère sur de longues distances, puis il tombe dans les lacs et les forêts avec les poussières et la pluie.
Lors de la mise en eau d'un nouveau réservoir, le mercure inorganique accumulé sur les terres est subitement transformé par les bactéries en une forme qui est facilement assimilée par les organismes vivants. Cette forme de mercure (le méthylmercure) peut devenir toxique à de fortes concentrations. Le mercure s'accumule pendant toute la vie des poissons de sorte que les plus vieux et les plus gros ont un taux plus élevé de mercure.
L'eau ne présente pas de danger de toxicité si on la boit. Par contre, les poissons prédateurs en ont des concentrations élevées et leur consommation humaine est dangereuse. La teneur moyenne en mercure des poissons a augmenté d'un facteur variant de 2 à 8, selon les espèces et les réservoirs.
On observe que le mercure est un problème transitoire dû à l'inondation subite des terres sous le nouveau réservoir. Après quelques dizaines d'années, les niveaux de contaminants rejoignent les niveaux naturels normalement observés.
Une autre source de pollution est celle due à l'utilisation des lubrifiants minéraux pour les équipements des centrales. C'est un phénomène accidentel de plus en plus maîtrisé et assez restreint. On se référera à la section sur la réduction des lubrifiants minéraux pour les turbines.
La modification des écoulements par l'installation de digues et barrages ou l'utilisation des déversoirs a des conséquences sur la qualité de l'eau.
Les cascades naturelles sont souvent complètement submergées et ne contribuent plus à l'oxygénation de l'eau. Cet effet a des répercussions importantes dans les zones climatiques chaudes, le réservoir vient à manquer d'oxygène dissout surtout en profondeur. Si cette eau est captée par la turbine et envoyée dans la rivière à l'aval, elle tue toute vie aquatique. C'est un phénomène très étudié et on a appris à y remédier en utilisant les turbines pour introduire de l'air dans l'eau. Cette solution est présenté ici.
Un autre effet des installations, c'est que lors des crues on utilise des évacuateurs qui souvent contribuent à dissoudre en excès l'azote de l'air dans l'eau. Les poissons en sont affectés et deviennent sujet à la prédation. Ici, le turbinage de l'eau à la place de l'utilisation de l'évacuateur réduit cet effet et est donc favorable. Malheureusement, il est très rare que les turbines soient dimensionnées pour la crue.
L'autre nuisance créée par le barrage est la diminution des transits.
Dans les sites montagneux comme les Alpes, l'Himalaya, les Rocheuses ou les Andes, les eaux sont chargées de sédiments qui transportés par les courants se retrouvent inévitablement dans les océans et lors des crues viennent enrichir les terres inondées. L'installation de barrages vient évidemment perturber ce transit, les sédiments se déposant dans les réservoirs au point de les remplir à plus ou moins long terme. Ce phénomène peut être géré en utilisant des dispositifs de vidange de fond.
Le transit de la faune aquatique est aussi perturbé par les barrages.
Cela affecte surtout les espèces qui ont besoin de migrer entre les océans et les rivières. Il y a les poissons anadromes qui remontent les rivières pour se reproduire et les poissons catadromes qui retournent à la mer pour se reproduire. Les saumons, aloses et esturgeons sont anadromes et les anguilles catadromes. Ce sont ces espèces qui suscitent le plus de préoccupations.
Pour la montaison, il y a des passages alternatifs qui permettent efficacement aux poissons de franchir le barrage. Ces installations sont donc construites en parallèle et n'affectent en rien les turbines.
Là ou les turbines peuvent être mises à contribution c'est lors de la dévalaison. En effet, pour franchir le barrage, la turbine présente un choix parfois incontournable, ce qui, essentiellement, justifie un travail d'optimisation.
Ces travaux permettent aux grandes turbines de la rivière Columbia d'accroître le taux de survie des alevins de 92 à 98% pour les nouvelles conceptions. Ce sujet est traité en détail ici.
Remarque :
L'hydroélectricité est certainement la source d'énergie qui affecte les plus grandes surfaces de territoire. Toutefois, les impacts les plus importants font l'objet de solutions d'atténuation et globalement s'estompent dans le temps.
Pour beaucoup de cas, le développement de projet hydroélectrique a permis d'étudier en profondeur les systèmes écologiques sur des territoires qui deviennent plus accessibles, de les développer et d'en permettre une exploitation avantageuse socialement. C'est aussi l'occasion de faire des inventaires de la faune et de la flore et de mieux comprendre comment ils sont affectés pour y remédier efficacement.